Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/205

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qui l’austérité des convictions, la fermeté du caractère, se mariaient à une rare simplicité de mœurs et à une douceur exquise.

Attaqués par le procureur-général, M. Rossée, avec un emportement dont la modération de M. Gérard, procureur du roi de Strasbourg, fit ressortir l’excès, les accusés furent éloquemment défendus. Chacun des avocats vint plaider à son tour, et sous des formes variées, le système de l’égalité devant la loi. Quant à M. Parquin, il n’eut, pour attirer à lui tous les cœurs, qu’à s’abandonner aux inspirations de la tendresse fraternelle. « 0 ma vénérable mère, s’écria-t-il en finissant, toi qui, à quatre-vingt deux ans, as retrouvé des jours sans repos et des nuits sans sommeil, toi qui accuses le ciel de ne t’avoir pas enlevée plus tôt à la terre, je te vois, je t’entends… Parquin, qu’as-tu fait de ton frère ?… Ah ! ma bonne, ma vénérable mère, sèche « tes pleurs. Ton fils ! un jury d’Alsace te le rendra. » Des sanglots retentirent alors de toutes parts, et ce fut au milieu d’un attendrissement inexprimable qu’on se sépara. Le lendemain, 18 janvier 1837, au moment où les jurés entraient dans la salle des délibérations, plusieurs voix s’élevèrent : Acquittez ! acquittez ! Un profond sentiment d’angoisse se peignait sur tous les visages. Mais, lorsque les jurés étant rentrés en séance, leur chef prononça ces mots « Sur mon honneur et ma conscience, devant Dieu et devant les hommes, sur toutes les questions, la réponse du jury est : Non, les accusés ne sont pas coupables, » il y eut dans l’auditoire un mouvement de satisfaction contenu à peine par le