Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/384

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

roi était là, encourageant ses ministres, leur soufflant la persévérance, les excitant à ne pas abandonner, par une soumission trop prompte aux décisions de la Chambre, le soin de la prérogative royale. On tenta donc un nouvel effort. Le corps électoral pouvait être séduit ou intimidé : on le crut, et la Chambre fut dissoute.

Alors vous eussiez vu, dans cette arène ouverte aux passions, les partis se précipiter pêle-mêle et haletants. Ce fut un désordre sans nom, une corruption sans exemple, un déchaînement inoui de violences. Pour écraser ses ennemis et pour vivre, le ministère mit tout en feu. De chaque coin de la France, préfets et sous-préfets sont mandés à Paris, et ils regagnent aussitôt leur poste, chargés de firmans électoraux. La province est inondée de feuilles ministérielles distribuées d’une main prodigue, au compte des fonds secrets. On promet, on menace. M. Persil, président de la commission des monnaies, était entré dans la coalition : on oublie ses déplorables services, et traité de factieux par le Journal des Débats, accusé d’avidité par la Presse, il est frappé d’une destitution aussi brutale qu’imprévue. M. Bruley, préfet de Tarn-et-Garonne, dénoncé comme un fonctionnaire trop indépendant, est appelé à Paris, et il se croise en quelque sorte, sur la route, avec son successeur. En vue des élections, les places sont comme mises à l’encan. On accorde aux communes qu’il faut gagner, les secours qu’elles réclament, soit pour réparer une église, soit pour achever un pont, soit pour fonder un hospice, soit pour établir une bibliothèque. Les pam-