Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/412

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l’idée de former un Cabinet de coalition, et l’on eut recours à M. de Broglie pour opérer un rapprochement entre M. Thiers et M. Guizot. Malheureusement, les situations s’étaient, depuis quelque temps, compliquées d’une manière étrange. Le jour où il s’était vu repoussé par la Gauche, M. Guizot avait commencé à reculer vers ses anciennes affections ; et les membres du Centre, ravis de le ramener à eux, avaient mis à profit son ressentiment. Or, si parmi les doctrinaires, les uns, à l’exemple de M. Duvergier de Hauranne, restaient fidèles à la coalition, les autres, à l’exemple de M. Hébert, n’étaient pas éloignés de s’armer contre elle. Voilà ce que M. Thiers n’ignorait pas, et il ne voulait point, pour renouer avec M. Guizot, manquer à ses engagements avec la Gauche. Il s’était fait un point d’honneur d’obtenir pour M. Odilon Barrot la présidence de la Chambre et plus ce résultat devenait incertain, plus il se préoccupait des moyens de l’atteindre. Jusqu’alors il s’était borné à dire : « Votons pour la présidence parlementaire de M. Barrot » : il demandait maintenant davantage, il demandait qu’on fît de la présidence du chef de la Gauche une question de Cabinet. Exigence qui parut exorbitante à M. Guizot et qui porta le dernier coup à la coalition !

Cependant, la société, si fortement remuée à sa surface, s’ébranlait déjà dans ses profondeurs ; déjà l’on entendait le bouillonnement des partis ; un mouvement inaccoutumé régnait dans les ambassades, et des courriers extraordinaires, lancés sur toutes les routes de l’Europe, allaient porter aux