Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/467

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taires, comme l’Angleterre en possède à Malte, comme la Russie en a une dans la mer Noire ; saisissez provisoirement un gage d’influence et de force qui vous mette en état de dominer ou la négociation ou les événements ; souvenez-vous d’Ancône ! »

Ces paroles de feu, la hardiesse et l’éclat de ces conseils, les funérailles d’un vaste empire sonnées en quelque sorte du haut de la tribune française, l’Europe conviée solennellement au partage des dépouilles de l’Islamisme, quel sujet démotion pour une assemblée, devant l’urne où allaient s’agiter de tels intérêts !

M. Villemain, ministre de l’instruction publique, avait dans le statu quo une cause difficile à défendre : il s’attacha moins à la plaider qu’à combattre les idées de M. de Lamartine, et il le fit avec une éloquente vivacité. « Quelle est, demandait-il, la solution de M. de Lamartine ? Pour solution, il vous offre la difficulté même. Oui, Messieurs, il est difficile de maintenir, de garder l’empire ottoman ; mais il est plus difficile encore de le partager entre les principales nations de l’Europe. Et, de plus, cette fois, la difficulté est une iniquité : J’aime mieux une difficulté qui est une justice. » M. Villemain, d’ailleurs, ne souscrivait pas à la sentence de mort dont on frappait la Turquie : « Le préopinant sait-il tout ce qu’il y a de vitalité dans un peuple ? sait-il combien il est malaisé de déraciner une nation du sol qu’elle occupe, lors même qu’elle l’a conquis ? Etait-il à Varna ? était-il à Chumla ? a-t-il vu comment, le génie de