Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/83

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souterraine ? Voilà sur quelles défiances, sincères évidemment, mais mal fondées, vivaient les meneurs de la Jeune Europe : c’était le fédéralisme en matière de conspiration. Aussi les efforts de la Jeune Europe étaient-ils dirigés, non du côté de la France, mais du côté de l’Allemagne et du Piémont. De sorte qu’en sommant la Suisse d’expulser les réfugiés, les ministres français, ne faisaient, à leurs risques et périls, que les affaires de la monarchie autrichienne.

Mais cela même servit à décider la Cour des Tuileries, tant on y était impatient de donner des gages à la ligue des Puissances absolutistes !

On en était là et l’on n’attendait plus qu’une occasion, lorsque, le 22 juin 1836, le Directoire de Berne[1] adressa au duc de Montebello une note[2] par laquelle le gouvernement français était prié de recevoir sur son territoire les réfugiés dont la Suisse pouvait être amenée à ordonner l’expulsion.

Ainsi, la Suisse allait d’elle-même au-devant de toutes les exigences. Mais ce n’était pas assez pour les Cabinets étrangers, qui brîilaient de compromettre la France, de la décrier, de lui aliéner le cœur des Suisses, de forcer enfin la royauté de juillet à faire amende honorable de son origine en se prononçant, à la face du monde, contre l’esprit révolutionnaire. M. de Montebello fut donc chargé, chose à peine croyable ! de répondre aux avances du Directoire de Berne par une note qui, rédigée à

  1. On sait qu’en Suisse, le Vorort est le gouvernement où siège la Diète, et qu’il est alternativement possède par Zurich, Berne et Lucerne. À l’époque dont il est ici question, Berne était le canton directeur.
  2. Voir aux Documents historiques, no 1.