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ORGANISATION

Entre la France et l’Angleterre un conflit est inévitable, parce que la constitution économique des deux pays est aujourd’hui la même, et en fait deux nations essentiellement maritimes. Le principe qui domine notre ordre social n’est-il pas celui de la concurrence illimitée ? La concurrence illimitée n’a-t-elle point pour corollaire une production qui s’accroît sans cesse et à l’aventure ? Pour trouver à une production dont l’essor est si impétueux et si déréglé des débouchés toujours nouveaux, ne faut-il pas conquérir industriellement le monde et commander aux mers ?

Le jour où nous avons détruit les jurandes et les maîtrises, ce jour-là la question s’est trouvée tout naturellement posée de la sorte : il y a une nation de trop dans le monde ; il faut ou que la France change son état social, ou que l’Angleterre soit rayée de la carte. Ce jour-là, en effet, d’étranges complications s’ajoutèrent à cette longue rivalité qui, au XVe siècle, amenait un duc de Bedford à Paris et faisait fuir Charles VII à Bourges. En 1789, la France adopta toutes les traditions de l’économie politique anglaise ; elle devint un peuple industriel à la manière du peuple anglais. Lancée sur la pente rapide de la concurrence, elle s’imposa la nécessité d’aller partout établir des comptoirs, d’avoir des agents dans tous les ports. Mais disputer l’Océan à l’Angleterre, c’était vouloir lui arracher la vie. Elle