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INTRODUCTION.

sante santé des capitaux la menace du même joug sous lequel fléchit la classe ouvrière ?

Ajoutons que, pour donner à la réforme politique de nombreux adhérents parmi le peuple, il est indispensable de lui montrer le rapport qui existe entre l’amélioration, soit morale, soit matérielle, de son sort et un changement de pouvoir. C’est ce qu’ont fait, dans tous les temps, les véritables amis du peuple ou ses vengeurs. C’est ce que firent jadis à Rome ceux qui, émus d’une pitié sainte à la vue des débiteurs pauvres trop cruellement persécutés, entraînèrent la multitude sur le mont Aventin. C’est ce que faisait l’immortel Tiberius Gracchus, lorsque, dénonciateur convaincu des usurpations de l’aristocratie romaine, il criait aux pâles vainqueurs du monde : « On vous appelle les maîtres de l’univers, et vous n’avez pas une pierre où vous puissiez reposer votre tête. » C’est ce que fit en 1647 le pêcheur Masaniello, lorsqu’au milieu de la ville de Naples affamée par les orgies du vice-roi, il poussa le cri : « Point de gabelles ! » C’est ce que firent enfin, il y a cinquante ans, ces philosophes fanatiques, ces vaillants soldats de la pensée, qui ne périrent à la tâche que parce qu’ils étaient venus trop tôt. À qui prétend le conduire, le peuple a droit de demander où on le mène. Il ne lui est arrivé que trop souvent déjà de s’agiter pour des mots, de combattre dans les ténèbres, de s’épuiser en dévouements dérisoires, et d’inonder de son sang, répandu au hasard, la route des ambitieux, tribuns de la veille, que le lendemain saluait oppresseurs !

Mais s’il est nécessaire de s’occuper d’une réforme sociale, il ne l’est pas moins de pousser à