Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/67

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ramène du monde beaucoup d’âmes que les circonstances de fortune, de naissance ou d’affection y auraient sans doute trop attachées. Quelquefois même, lorsque l’épée est entrée jusqu’à la garde, l’homme rencontre l’exquise joie qui existe au fond de l’extrême douleur, et, sentant que c’est la main de Dieu qui vient de frapper, il se retourne pour la baiser.

La douleur produit des héros, parce qu’elle ramène de ses mystérieux champs de bataille des âmes fermes et généreuses. Personne n’est entré plus avant dans l’amour que celui qui a vu plusieurs fois la mort, en ces heures solennelles où le moi apporte son abdication. Par une action intérieure, la douleur produit le même effet dans notre âme. Elle tient ainsi secrètement une école d’héroïsme. Il n’y a rien de bon au monde comme les saints et les vieux soldats[1] !

  1. Le soldat suit la ligne d’éducation du saint. La guerre entreprend et la sainteté accomplit l’école du sacrifice. Toutes deux firent naître en l’homme la soif sacrée de la mort. Le christianisme fit jaillir des légions de martyrs du sein des familles patriciennes et guerrières de Rome.

    « Un phénomène remarquable, observe J. de Maistre, c’est que le