Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/77

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Interrogez l’humanité, qui a su admirer le sacrifice comme la plus sublime des choses. Voyez à qui elle donne le nom de héros, le nom de grand, le nom de saint !

Humanité ! humanité ! pourquoi admires-tu les hommes qui savent mourir ? Où y aurait-il donc tant de gloire à se démettre de la vie ? Rien n’existe d’abord que la vie, le Ciel lui-même s’en déduit. Pourquoi une sainte amnistie s’élève-elle des champs de bataille ? Pourquoi Dieu a-t-il permis la guerre aussi longtemps parmi les hommes ? Pourquoi à cet être qui vit, est-il toujours noble, toujours saint, oui, toujours glorieux et divin de mourir[1] ? — Pourquoi ? Parce que, dans la

  1. « N’y a-t-il pas quelque chose d’inexplicable, dit l’auteur du Pape, dans le prix extraordinaire que les hommes ont toujours attaché à la gloire militaire ? Pourquoi ce qu’il y a de plus honorable au jugement du genre humain est-il le droit de répandre innocemment le sang innocent ? Il faut que les fonctions de la guerre tiennent à une grande loi du monde spirituel ! Ce ne peut pas être sans une haute raison que toutes les nations de l’univers se sont accordées à voir dans ce fléau quelque chose de plus particulièrement divin que dans les autres. »

    La guerre est divine parce que, ouvrant carrière au sacrifice, elle forme pour Dieu une foule d’âmes parfaites dans le peuple. « Il ne faut point s’en prendre à Hélène de la guerre de Troie, dit Euripide, faisant parler Apollon dans la tragédie d’Oreste ; la beauté