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même de la patrie un certain nombre de ses enfants, elle contracte envers ceux que la guerre a rendus invalides une dette incontestable. En effet, la société doit garantir an moins l’existence à ceux de ses membres qu’une guerre soutenue pour repousser un danger commun a rendus incapables de se procurer les moyens de vivre, car ces citoyens ont rempli à eux seuls un devoir qui incombait à tous, et il n’est que juste qu’ils soient indemnisés par ceux qui ont profité de leurs sacrifices.

On ne trouve pas dans l’antiquité d’institutions établissant par des dispositions fixes et régulières les secours à donner aux citoyens devenus invalides à la guerre. Dans la Grèce, où tout homme était soldat, on pensait qu’un citoyen n’avait fait qu’accomplir un devoir en prenant les armes pour la patrie ; il trouvait dans la gloire si chère à ces peuples héroïques, et dans l’admiration de ses concitoyens la récompense de sa bravoure et la compensation de ses souCrances. Cette admiration devait cependant être accompagnée de dons volontaires offerts aux citoyens mutilés dans les combats ; quelquefois même des secours leur furent accordés aux frais de la république. Chez les Romains, la législation n’était pas plus précise. Dans les premiers temps de la république, il est probable que les guerriers n’avaient que leur part de butin pour prix de leurs blessures. Plus tard on leur distribua des terres conquises ; c’est ainsi que Sylla et César récompensèrent leurs vétérans. D’ailleurs, pour

ces’légionnaires, par les mains desquels les richesses du monde venaient s’accumuler à Rome, le métier de soldat devait être assez lucratif. Ce n’est qu’à partir de Charlemagne qu’on commence à s’occuper du sort des hommes de guerre devenus invalides. Ce prince imposa aux abbayes et monastères de fondation royale l’obligation de recevoir des soldats estropiés. Ceux qui étaient admis dans ces asiles étaient appelés oblats ou frères lais et remplissaient les fonctions les plus humbles. Saint Louis fut le premier qui conçut l’idée de réunir dans une maison hospitalière les soldats invalides ; mais l’hospice des Quinze-Vingts, créé par lui en faveur des croisés qui avaient perdu la vue en Palestine, ne s’adressait qu’à une classe d’individus et n’admettait qu’un genre d’infirmités. Henri IV institua rue de l’Ourcine, sous le nom de Maison de la charité chrétienne, une retraite pour les officiers estropiés et caducs. LouisX)U,modinantcette institution, transporta les membres de la communauté de l’Ourcine au château de Bicêtre, où il fonda une commanderie de Saint-Louis. La destination de cet établissement était déBnie dans les termes suivants par rédit royal Tous ceux qui feront voir par de bonnes attestations qu’ils ont été estropiés à la guerre pour le service du roi, seront reçus et admis pour y être nourris et entretenus, le reste de leurs jours, de toutes choses nécessaires à la vie.

Enfin, Louis XIV, en créant l’Hôtel des Invalides militaires, vint donner à cette institution la forme qu’elle a conservée Jusqu’ici. Cette fondation fut digne de la grandeur et de l’éclat de son règne. L’Hôtel des Invalides est un établissement qu’on admire encore aujourd’hui.

Commencé en 1670, sur les plans de Libéral Bruant, l’édiBce, dont Lonvois posa la première pierre, ne fut achevé que trente ans plus tard par Mansart. Voici par quels moyens Louis XIV avait pourvu à la dotation de cet établissement : 11 est ordonné aux trésoriers, tant de l’ordinaire que de l’extraordinaire de la guerre et cavalerie légère, de retenir par leurs main : sur toutes les dépenses généralement qu’ils feront du maniement des deniers de leurs charges, deux deniers pouf livre, pour être ce fonds de deux deniers employé à la construction d’un hôtel royal d’une grandeur et d’un espace capables de recevoir et loger tous les officiers et soldats, tant estropiés que vieux et caducs de ses troupes. à

Les capitaux qui appartenaient à la dotation des invalides firent retour an Trésor en 1832. Depuis cette époque, les dépenses de cet établissement forment un chapitre spécial du

budget du ministère de la guerre. Dans un rapport à l’empereur, accompagnant un décret du 27 juin t8G3, portant règlement de l’Hôtel des Invalides, le ministre de la guerre détermine ainsi le but de cette institution Dans l’état actuel de la législation, l’admission à l’Hôtel des Invalides n’a d’autre but que de suppléer à l’insuffisance de la pension de retraite, lorsqu’il s’agit de militaires auxquels leur âge, des blessures ou des infirmités ne permettent plus le travail ou rendent indispensables des soins particuliers. Dans le principe, pour être admis à l’Hôtel il fallait avoir des blessures graves, ou compter 30 ans de services et 60 ans d’âge mais aujourd’hui que les sonsofficiers et soldats obtiennent une pension de retraite après 25 ans de services, la condition de 30 ans de services n’est plus nécessaire ; la possession d’une pension de retraite constitue pour les sexagénaires un titre suffisant à l’admission. L’effectif de l’Hôtel, en 1870, était de 1,052 hommes. Pendant les guerres du premier Empire il avait atteint le chiffre énorme de 26,000, et on avait dû créer diverses succursales qui aujourd’hui n’existent plus. Un certain nombre d’invalides sont, en outre, autorisés à habiter hors de IHôtei et reçoivent des secours en nature et en argent.

D’après le budget de l’exercice 1870, les traitements du personnel de l’Hôtel, y compris la solde donnée pour menus besoins anx militaires invalides de tous grades, était de 207,000 fr.

La subsistance et l’entretien de 1,052 invalides présents à l’Hôtei, an prix moyen de 2 fr. 10 c. par jour, occasionnaient une dépense de 806,358 fr.

Le total de la somme portée au budget dela guerre pour lc service de l’Hôtel des Invalides, y compris les frais d’exploitation et dépenses diverses, s’élevait à 1,463,529 fr.