Page:Block - Dictionnaire général de la politique, tome 2.djvu/149

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ruina tont un quartier de Constantinople. Il y eut 2,500 janissaires exécutes, des bannis en foule. Les derviches bektachis furent supprimés en même temps.

Ce corps des janissaires, instrument, terreur et victime du despotisme, commença et unit dans le sang. H était devenu tyrannique à la tyrannie même. Comme pour les institutions analogues, leurs excès devaient appeler une réaction, et ils n’évitèrent pas la catastrophe qui résultait de la nature même des choses.

COttPABEZ Isaurlens, Prétoriens, Strélitz. JANSÉNISTES ET MOLINISTES. La querelle, toute théologique d’ailleurs, desjausénistes et des molinistes, a exercé une influence trop considérable sur la politique intérieure de Louis XIV pour que nous ne lui consacrions pas un court article. On sait que ce roi, qu’on qualifiait de Grand, et dont le régne a été rendu tristement célèbre par les dragonnades, ne se borua pas à persécuterles reformes, mais exerça des violences même contre des catholiques, dont les opinions avaient eu le malheur de déplaire à ses courtisans. Un exposé rapide du sujet de la dispute suffira pour mettre le lecteur à même de juger jusqu’où le despotisme peut s’égarer lorsqu’il prétend asservir jusqu’aux consciences.

Voici les cinq propositions de Jansénius, qui sont réellement dans cet auteur a H y a des gens à qui Dieu commande des vertus qui leur sont impossibles, faute de la grâce on ne résiste jamais à la grâce intérieure ; on est cependaut coupable de ne pas agir comme si on l’avait, parce qu’il suffit, pour être responsable, de consentir à ce qu’on fait ; l’hérésie dessemipélagiens consistait à croire qu’on pouvait résister à la grâce Jésus-Christ n’est pas mort pour tous les hommes. » Cette doctrine n’est peut-être ni très-sensée, ni très-douce, ni trèsmorale mais elle a séduit Saint-Cyran, Pascal, Quesnel, les Arnaud, Racine, Boi)eau ; bien d’autres encore, pléiade honnête et savante ; elle fut de plus la fol du Parlement, de l’ordre judiciaire presque tout entier, de tous les États qui se rattachaient à l’administration de la jnstice, eu général même, on peut le dire, de toute la haute bourgeoisie. Le calvinisme ayant été violemment éliminé de France, les classes lettrées, celles que nous appellerions aujourd’hui les classes conservatrices et libérales, s’étaient rattachées à la doctrine qui, dans le sein du catholicisme, se rapprochait le plus du protestantisme. C’était comme un demi-caivinisme qui satisfaisait le besoin de discussion et d’opposition inhérent à la bourgeoisie française, sans aller jusqu’à l’indépendance complète d’esprit réservée au petit nombre des libertins Par cela seul qu’on était janséniste, on était donc parlementaire, homme d’opposition modérée on encourait la disgrâce royale, et bientôt la persécution, quand Louis XIV fut entièrement dominé par les jésuites. Car les jésuites, qui ne prêchaient plus le régicide, et n.

JACQUES DE BOISJOSLIN.

qui gouvernaient les rois par la confession, soutenaient le système de Molina. hiolina n’est pas, comme on pourrait croire, un défenseur du libre arbitre absolu. il n’admettait pas que la grâce fût irrésistible, mais il assurait que Dieu devine nos résolutions futures par sa science moyenne et qu’ilnous donne ou retire sa grâce en conséquence, ce qui est J’effet du congruisme. Lui ou ses disciples inventèrent la grâce efBcace, suffisante, versatile, prévenante, coopérante, etc., dont on ne peut pas exiger de nous une définit~ claire, pas plus que des inventeurs eux-méTies. Ainsi la dispute n’avait pas toute ]a grandeur de celle des pélagiens et des prédestinatiens, des arminiens et des gomaristes. Elle divisait les disciples de la grâce, dont les uns voulaient cette élection divine forte de ia seule logique, et les autres la conciliaient avec le peu qu’ils savaient du libre arbitre et avec la connaissance, beaucoup plus grande, qu’ils avaient de la casuistique.

La doctrine des molinistes peut presque passer pour une plaisanterie. Celle de leurs ennemis est désespérante et fait craindre pour le principe de toute morale. SiJa vertu n’est qu’une faveur de Dieu, le mal moral n’est qu’une disgrâce et ce Dieu en est responsable. Les jansénistes concluaient de la doctrine du ’péché originel, transmis à toutes les âmes par une douloureuse succession, que Dieu ne devait la grâce à personne, mais qu’il la donnait à quelques-uns par miséricorde et Ja refusait aux autres par justice. Saint Augustin, saint Chrysostome, Luther et Calvin avaient raisonné à peu près de même ; on ne peut nier que leur doctrine ne soit plus conforme à la logique du christianisme, mais on s’explique aisément que la conscience des peuples, qui en somme ne s’en tient pas à la logique des religions, mais les transforme selon ses besoins moraux, ait préféré croire à un Dieu juste qu’âuu Dieu injuste. Aussi, comme il n’était question alors d’aucune théorie sur le déterminisme des voJontés, il est naturel que les peuples aient préféré à l’orthodoxie janséniste l’enseignement courant de l’ËgJise, qui au moins faisait une place au libre arbitre.

Ce sera un éternel sujet d’étonnement qu’on ait fait un article de foi, non de savoir si cette déplorable doctrine de Jansénius était vraie, mais si elle était de Jansénius. Il y avait un moyen de s’en assurer, c’était de le lire ; mais personne ne le voulait, et le pape le défendait, disant que, puisqu’il avait déclaré hérétique une proposition, il fallait bien qu’elle fût dans un livre. Il n’est pas moins étonnant qu’on ait voulu faire signer une condamnation du jansénisme par les religieuses de Port-Royal, et que ces religieuses aient refusé, parce que Jansénius était infaillible.

Les croyances de ces pieuses dames n’étaient peut-être pas orthodoxes, mais certainement leur erreur ne mettait pas l’État en danger. Arnaud, exclu de là Sorbonne et proscrit, ses amis jetés à la Bastille, les religieuses de Port-Royal deux fois dispersées, le Parle-