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LOI.

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permet d’expliquer les parties par l’ensemble. Elle représente un corps de doctrine, un corpus juris ; la loi spéciale n’est qu’un membre de ce corps, et en la considérant. olément, on peut lui attribuer une importance exagérée, la développer outre mesure et détruire ainsi l’harmonie de l’ensemble. Les grands législateurs de tous les pays se sont occupés de préférence de codification. César a déjà exprimé l’idée, téalisée plus tard par Théodose et Justinien, de codifier le droit romain. Charlemagne a promulgué, il est vrai, un grand nombre de lois spéciales, mais lui aussi aimait à s’occuper de codification. L’empereur germanique Frédéric le roi Frédéric II de Prusse, Louis XIV et Napoléon I" en France, se sont posé des monuments impérissables par leurs codes. Et si l’Angleterre s’est bornée jusqu’à ce jour à accumuler des lois spéciales dont la masse rend si difficile l’étude du droit anglais, elle ressent les inconvénients de cet état de choses, et les Anglo-Américains, qui partageaient ce mal, se préparent à le faire cesser chez eux.

Du reste, la codification se présente sous deux formes. Elle peut n’être qu’une collection complète on abrégée de textes, une analyse des lois en vigueur ; ou clle consiste en une élaboration nouvelle, une refonte de toute la matière légale et apparaît comme une œuvre à part. Justinien a principalement suivi l’une de ces deux méthodes ; les modernes pratiquent généralement l’autre. La première produit une compilation, la seconde une œuvre originale. Néanmoins, on aurait tort de préférer l’une d’elles d’une manière trop absolue la préférence doit être déterminée par les circonstances. Lorsque Justinien fit rédiger les Pandectes et le code qui porte son nom, il agit sa.gement, surtout relativement aux Pandectes, en faisant compiler une collection de textes et d’extraits, car l’époque classique de la jurisprudence romaine dépassait singulièrement la sienne dans la science du droit et dans l’art de formuler les principes légaux. En créant t une collection, Justinien a conservé à la postérité le trésor de la science juridique des Romains, tandis que s’il avait rédigé une œuvre nouvelle, celle-ci n’aurait jamais conquis une grande autorité auprès des générations postérieures. Au contraire, si la législation du dixneuvième siècle voulait se borner à colliger les prescriptions légales des siècles antérieurs, elle arrêterait indubitablement les progrés du droit et nous forcerait à emprisonner dans le cercle étroit des notions juridiques du moyen âge les relations infiniment plus larges de t’époque actuelle. Ajoutons enfin qu’une élaboration nouvelle est toujours un travail d’un ordre supérieur à l’opérahon du compilateur, car elle suppose une activité intellectuelle indépendante, une spontanéité qui n’est pas nécessaire pour réunir une collection.

H ne faudrait pas s’attendre, cependant, à ne trouver que du Mo<tfeaM dans un code élaboré. L’abstraction complète du passé, une création entièrement nouvelle serait même une qualité rien moins que méritoire. Pas plus que la vie d’un individu, celle d’une nation ne saurachanger du jour au lendemain, et pour que )e droit soit investi de toute son autorité morafe il doit avoir ses racines dans le passé, et se rattacher à tout ce qui est resté sain dans l’or. dre légal antérieur. Tout ce qui, dans le droit nouveau, concorde avec le droit ancien, en para !t la continuation et lui concilie la véné.ration vouée à l’àge, la force qui repose dans l’habitude, l’affection conservée aux moeurs du pays. La méthode rationnelle, c’est-à-dire celle qui a des principes pour point de départ, c’cx. dut pas l’examen des éléments historiques du droit ; elle en tient, an contraire, grandement compte. On peut, en effet, distinguer deux élé.ments dans les lois, un élément réel ou maté. riel, les faits, les circonstances, et un élément idéal, l’autorité de l’esprit de justice. Si la lé. gislation se bornait à s’inspirer de la justice abstraite, sans envisager également les faits elle créerait une utopie ; la loi n’existerait qne sur le papier, elle ne vivrait pas. U n’est pas nécessaire que la codification soit absolument complète. Elle ne doit embrasser l’ensemble d’une branche du droit qu’en tant que toutes ses parties peuvent être fixées avec une égale précision. Lorsque cer.taines parties paraissent encore soumises à de trop grandes incertitudes, comme lorsque les institutions auxquelles elles se rapportent sont de dates récentes (chemins de fer, télé. graphe), le législateur fera bien de les réser.ver à la législation spéciale. Il doit en être ainsi surtout des matières influencées par les vicissitudes de la politique, (t~oy. aussi CodiBcation.) . Lois générales et lois locales. Z.~t’~a<tM de fE<<~ et autonomie. Le moyen âge avait localisé la législation, de sorte que l’autonomie des seigneuries, des villes, des communes, des corporations avait une importance bien plus grande que la législation de l’État. Cette variété infinie des lois répondait au caractère dominant de l’époque. Le désir de s’isoler et de vivre à sa guise dans un cercle étroit, fut si puissant qu’il détruisit l’unité de FjÈtat et empécha le développement de l’esprit national. De nos jours, l’État tend à généraliser la législation, à l’étendre sur l’ensemble du territoire, H veut réaliser l’unité et considère l’uniformité du droit comme l’une des bases de son organisation.

Cependant la généralisation des lois ne saurait être appliquée d’une manière absolue. ll est quelquefois des circonstances particulières, qui n’existent que dans certaines parties du territoire, et qui cependant sont dignes de la protection des lois. D’autres fois il s’agit de faits relatifs à une classe déterminée de la population, qu’il devient nécessaire de régler iégislativement, sans qu’il y ait lieu de rendre la loi obligatoire pour la nation entière. Des différences de race, de religion, de profession, de circonstances locales, ne doivent plus, comme dans le moyen âge, établir plusieurs droits dans le droit, mais elles ne doivent pas non