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MARIAGE.

Gratien et Valentinien fi ajoutèrent les Barbares. Mais cette dernière disposition, admise par les eompilateurs des Wisigoths, ne le fut pas par ceux de Justinien. Théodose défendit le mariage entre cousins germains sous peine d’être brutes vifs. Les prohibitions ne s’arrêtèrent pas là. L’Église chrétienne les étendit jusqu’à la quatrième génération inclusivement en ligne collatérale et dans les familles légitimement alliées, et en même temps elle supposa des auinités spirituelles issues de la commune participation à certaines cérémonies religieuses et formant des empêchements dirimants, capables de frapper le mariage de nullité. Ainsi par exemple, il y a affinité spirituelle entre deux personnes qui ont été parrain et marraine d’un enfant, et par suite de cette circonstance, elles ne peuvent pas, quoique de familles tout à fait étrangères l’une à l’autre, s’unir par le mariage d’après les lois ecclésiastiques.

Quelques-unes de ces prohibitions sont passées dans les législations modernes. Les églises protestantes d’Allemagne, contrairement à l’opinion de Luther qui s’était prononcé pour la validité des mariages entre les chrétiens et les juifs ou païens (tM~er’j ! We~e, éd. Walch, t. X, p. 756), se sont prononcées, comme les catholiques, contre ces unions, et la loi civile, les suivant sur ce terrain, a admis cette cause d’empêchement. Quelques États allemands ont cependant permis le mariage entre chrétiens et juifs. (Édit de Weimar, 20 juin 1823 Brunswick, loi du 23 mai 1848 ; Hambourg, décret provisoire du 25 septembre 1851.) Dans le Mecidemhourg, un édit analogue rendu le 22 février 1812, a depuis été suspendu. Le droit civil prussien (2’ partie, titre l", 36) ne prohibe pas expressément ces unions ; mais dans la pratique elles sont impossibles, parce qu’en Prusse, où la bénédiction ecclésiastique est la forme nécessaire de la conclusion du mariage, les pasteurs, conformément aux anciennes décisions de l’Église luthérienne, ne veillent pas les célébrer : autre exemple des dilncultés que fait naître l’intervention de l’élément religieux Jans des questions purement civiles. Du reste, ces ditneultés s’en vont. En France, toutes les prohibitions issues des croyancesreligieuses ou de préjugés aristocratiques ont été écartées. Onn’aadmisdanslaloi que celles qui sont imposées par la nature des choses. En thèse générale, la faculté de se marier est un droit naturel et civil qui appartient à tous les membres de la société sans distinction de culte, de rang et de fortune. L’exercice de ce droit ne rencontre que deux empêchements absolus, l’un résultant de nos mœnrs et de notre organisation sociale, savoir qu’on ne peut contracter nn second mariage avant la dissolution du premier ; l’autre dicté par le sentiment moral, savoir que tout mariage est interdit entre parents et enfants, et entre frère et soeur. (Code Nap., 161 et 162.) Toutes les autres prohibitions peuvent être levées ou par des dispenses, ou par le temps, ou par certaines formalités. Dans la première catégorie, il faut placer les unions entre l’oncle et la nièce, entre la tante et le neveu, et entre le beau-frère et la beUe-soenr. Interdites en général, elles peuvent en certains cas être autorisées (Code Nap., 163.) Dans cette même catégorie, aussi bien que dans la seconde, il faut mettre l’empêchement résultant ~lu défaut d’àge. Cet empêchement peut être levé par des dispenses ; d’ailleurs le temps le fait naturellement disparaître. La limite d’âge, qui varie nécessairement selon les climats, est placée, par le Code Napoiéon, à dix-huit ans pour les hommes, et à quinze ans pour les femmes. En fixant cette limite, la loi a eu égard à ces deux circonstances que le mariage ne saurait convenablement avoir lieu avant l’âge de puberté et avant un certain développement de la raison. Enfin, dans la troisième catégorie, il faut placer l’empêchement à contracter mariage pour les fils et les filles qui, bien qu’ayant atteint l’âge propre au mariage, n’ont pasle consentement de leurs père et mëre,àdéfautde ceux-ci, de leurs ascendants, et encore à défaut de ces derniers, d’un conseil de famille. Mais cet empèchement n’est que temporaire ; il disparait à la suite de formalités prescrites par le Code civil. (Liv. I, tit. V, chap. ler.) Certaines positions sociales créent des empêchements à contracter mariage. En France,

comme d’ailleurs en plusieurs autres pays, les soldats ont besoin de la permission de l’autorité militaire pour pouvoir se marier. Dans les pays catholiques, les personnes engagées dans les ordres ou dans quelque profession religieuse ne peuvent en aucune façon contracter mariage. En France, la loi ne reconnait pas les vœux religieux ; dans l’ordre civil, les obligations purement ecclésiastiques et spirituelles n’ont aucune force obligatoire. C’est bien ainsi que l’ont entendu les rédacteurs de notre Code civil. e Vous ne trouverez plus dans la loi nouvelle, disait M. Gillet aux membres du Tribunat, aucun de ces empêchements opposés par des barrières purement . !pM’ :<Me//M ; non qu’elles ne puissent s’élever encore dans le domaine respecté des consciences, mais elles ont dû disparaître dans le domaine de la loi, dirigée par des vues d’un autre ordre. » M. Portalis, dans son rapport au gouvernement, ne fat pas moins explicite La prêtrise, dit-il, n’est point un empêchement au mariage ; une opposition au mariage fondée sur ce point ne serait pas reçue, parce que l’empêchement provenant de la prêtrise n’a pas été sanctionné par la loi civile. La Cour de cassation est cependant d’une opinion contraire. Elle pense que l’État, en salariant le prêtre, en attachant à ses fonctions, dans l’ordre civil, certaines prérogatives, telles que l’affranchissement du service militaire et celui de la garde nationale, reconnait l’ordination qu’il a reçue et par suite l’engagement solennel qu’il a pris de vivre dans le célibat, engagement qui a été une des conditions 1. Il faut espérer que le système des dispenses sera un jour abandonné. Ce sera lorsque dominera ie principe qu’on ne doit jamais défendre ce qu’on aurait pu permettre. M. B.