Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/230

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que le souffle lui manquât, comme s’il espérait mourir à force de parler, sa parole s’exaltant de plus en plus, jusqu’à devenir quelque chose d’effrayant, de lumineux, de surnaturel.

Cet homme sans éloquence fut sublime. Il s’exprima tellement sur la pauvreté que son guenilleux auditoire parut un congrès de potentats et qu’à la fin, la hautaine vicomtesse eut l’air d’une infortunée qui mendie son pain.

Quand ce fut l’instant de la communion pascale, il arriva simplement ceci :

Brunissende agenouillée la première, le troupeau des humbles s’approchant, recula soudain, comme devant un mur de flammes et le prêtre qui descendait la dernière marche de l’autel pour s’en venir, portant le ciboire, vers la table sainte, remonta précipitamment…

On fut obligé de purifier le sanctuaire, et tous les ans, à pareil jour, une cérémonie lavatoire est scrupuleusement observée.

La vicomtesse des Égards paraît vivre depuis cette époque, mais elle est, en réalité, plus misérable que les habitantes des tombeaux…

Ainsi me fut expliquée la déconfiture politique d’un des fantoches les plus éminents de l’ordre moral.