Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/266

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sommations extra-judiciaires qu’il se fit à lui-même d’avoir à suivre sa Clémentine au tombeau dans des délais fort prochains que, d’ailleurs, il ne fixa pas.

Ayant eu le loisir d’étudier à fond cet homme sympathique avec qui j’entretins, dix ans, les plus étroites relations commerciales, il me fut donné d’observer un trait admirable, quoique peu connu, de son caractère.

Il avait une peur atroce d’être cocu. Tous ses ancêtres l’avaient été, depuis deux ou trois cents ans, et sa tendresse pour sa femme tenait surtout à la certitude inébranlable d’être exceptionnellement assuré par elle de l’intégrité de son front.

Sa reconnaissance avait même quelque chose de profondément cocasse et touchant. À la réflexion, cela finissait par devenir à peu près tragique, et je me suis demandé parfois, avec stupeur, si la stérilité scandaleuse de Clémentine était explicable autrement que par certains doutes bien étranges que pouvait avoir Tertullien sur sa propre identité, et par une crainte sublime de se cocufier lui-même, — en la fécondant.



Mais tout cela était trop beau, trop au-dessus des Marolles, des Bondons ou des Livarots, et la chose banale arriva qui devait infailliblement arriver.

Clémentine ayant restitué son âme au Seigneur,