Page:Bloy - Le Désespéré.djvu/60

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Auparavant, il avait été chaste à la manière des prisonniers et des matelots, lesquels ne voient ordinairement dans l’amour qu’une désirable friction malpropre, en l’obscurité de coûteux repaires. Tantale stoïque d’un festin d’ordures, il s’était résigné, comme il avait pu, à la privation des inespérables immondices. D’un côté, le dénûment absolu, de l’autre, la timidité la plus incroyable chez un tel violent, le préservèrent plus efficacement que la religion même, quand elle intervint pour lui amollir le cœur…

Les hauts penseurs qui décrètent professionnellement le balayage de toute notion religieuse, ont cette amusante contradiction d’exiger que les chrétiens dont la foi résiste à leurs récurages et à leur potasse soient, au moins, des saints. Surtout, ils les veulent purs. Ils leur disent des choses aussi robustes que ceci : Vous péchez, donc vous êtes des hypocrites ; enthymème lacustre d’une autorité certaine sur les palmes et les squames du marécage antireligieux.

Ce ne serait pas encore trop bête, s’il ne s’agissait ici, pour l’âme pensante, livrée aux Dévorants invisibles, que d’un combat très difficile où l’héroïsme continuel fût de rigueur. Après tout, c’est une politique judicieuse et barbue comme l’expérience même, d’empiler sur les épaules d’autrui d’écrasants fardeaux qu’on ne voudrait pas seulement remuer du bout des doigts.

Mais le sentiment religieux est une passion d’amour et voilà ce qu’ils ne comprendront jamais, ces pédagogues de notre dernière enfance, quand il