Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/246

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exposée au vertige, en ne retrouvant plus le compte mystérieux de ses Empereurs…

Souvenez-vous seulement que c’est une Aumône et que, seul de tous les êtres humains, j’ai le pouvoir de la faire. C’est l’aumône à l’ouvrier de la onzième heure, à la Prusse parvenue qui adorait encore les idoles, quand tout l’Occident chrétien avait déjà combattu pendant des siècles.

Dépositaire mourant et vaincu de ce Signe de domination, je l’abandonne volontiers à celui qui fut désigné pour me renverser. Si ma race n’est pas condamnée et si mon fils unique me succède un jour, il saura bien la reprendre, avec l’Assistance de Dieu…

La stature de ce Pauvre extraordinaire avait paru grandir démesurément, jusqu’à crever le plafond de cette chambre de malheureux qui n’avait assurément jamais entendu de telles paroles.

Bismarck était devenu tout à fait muet, songeur et peut-être même véritablement respectueux pour la première fois de sa vie.

Comme s’il sortait d’un rêve pénible, Napoléon se passa plusieurs fois la main sur le front, prit ensuite une cigarette dans un étui d’or, l’alluma tranquillement et, regardant, avec une extrême douceur, le Chancelier du prochain Empire d’Allemagne, descendit s’asseoir à côté de lui sur un