Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/178

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homme d’esprit qui riait de tout, et il se trouvait avec lui plus à l’aise qu’avec des gens comme Caton ou Brutus, dont la raideur l’effrayait. Il le défendit devant les tribunaux, quand une femme qu’il avait aimée essaya de le perdre, et ce plaidoyer est assurément un des plus agréables qui nous restent de lui. Plus tard, lorsqu’il fut forcé d’aller en Cilicie, il le choisit pour son correspondant politique. Par un hasard heureux, les lettres de Cælius nous sont parvenues avec celles de Cicéron, et il n’y en a point dans tout ce recueil qui soient plus spirituelles et plus piquantes. Rassemblons tous les détails qui y sont épars ; essayons de refaire, en les recueillant, l’histoire de Cælius, et par elle d’avoir une idée de ce qu’était alors la jeunesse romaine. Il n’est pas sans intérêt de la connaître, car elle a joué un rôle important, et c’est d’elle surtout que César s’est servi pour la révolution qu’il voulait accomplir.

I

Cælius ne sortait pas d’une famille illustre. Il était fils d’un chevalier romain de Pouzzoles qui avait fait le commerce et acquis de grands biens en Afrique. Son père, qui n’avait eu toute sa vie d’autre souci que de s’enrichir, montra, comme il arrive, plus d’ambition pour son fils que pour lui-même : il voulut qu’il devint un homme politique, et comme il voyait qu’on n’arrivait aux dignités que par l’éloquence, il l’amena de bonne heure à Cicéron, pour qu’il en fit, s’il était possible, un grand orateur.

Ce n’était pas encore l’usage qu’on enfermât les jeunes gens dans les écoles des rhéteurs, et qu’on se contentât de les exercer à des causes imaginaires Dès qu’ils avaient la robe virile, c’est-à-dire vers seize ans, on s’empressait