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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

2 décembre.

Le canon tonne, tonne sans relâche. Ce ne sont plus des coups isolés comme hier, c’est le roulement continu et immense d’un tonnerre tout proche de nous. Il le faut sans doute, puisque Ducrot, puis Paris nous attendent… Pourquoi ce canon de la délivrance ne sait-il pas prendre un son moins lugubre ? On a beau faire ; malgré l’espérance, son grondement est sinistre.

Il est midi. Combien de coups ont déjà porté ? Français ou Allemands, combien fauchés par les boulets ou déchirés par les obus ?

On tire à gauche et aussi au nord, c’est sans doute l’attaque sur la route de Chartres. Vit-il encore l’officier gascon qui riait avant-hier des malices allemandes ? Pauvre femme à qui j’écris, je veillerai du moins à ce que ma lettre ne te porte pas l’angoisse du sort de ton fils avant que je n’en aie reçu de nouvelles.

On me dit que nos préparatifs ne serviront de rien ; tant mieux. Et pourtant j’y travaille toujours, il me semble découvrir à chaque instant un petit progrès possible, quelque arrangement meilleur. Et puis, comment tenir en place ?