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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

heures, nos positions de la veille étaient bien et duement reconquises, reconquises de cette vraie bonne manière que l’on croyait perdue chez nous. Il y a eu un moment ou j’en ai presque oublié Maurice ! Tu ne l’aurais pas fait, toi, mais la joie de retrouver notre ancien entrain guerrier m’avait rendu ce bon orgueil patriotique qu’il est si doux d’éprouver, et que nous avons trop désappris.

Ce matin nos positions n’avaient pas été attaquées ; mais les conserver sans pouvoir avancer ne nous menait à rien. Le général en chef les a fait évacuer et a replacé les troupes derrière la Marne. J’en reviens maintenant à Maurice.

Et d’abord, figure-toi un garçon consterné de n’avoir pris, en trois jours de combat, ni drapeau, ni canon, ni redoute, ni même officier-général ! Il paraît que ton fils avait cru jusqu’à présent qu’il suffisait de vouloir, pour faire ce qu’on appelle un coup d’éclat. Se sentant toute la bonne volonté nécessaire, il n’avait pas douté que l’occasion ne se présentât d’elle-même :

« Mais, père, que voulez-vous ? le 30, le général m’envoie au général Susbielle, j’arrive justement quand il se repliait de Montmesly sur Créteil, c’était dur de commencer par se sauver. Hier, il semblait qu’on était tout près les uns des autres et que les occasions ne manqueraient pas ; voilà que le général m’expédie le matin à Avron commander le feu