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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

de là, c’est pas possible avec deux seules bêtes éreintées comme cela, et une côte à grimper ! Si encore on se trouvait sur une route ! Mais ces sillons-là valent des fossés.

— Ne dételez pas, dit Maurice avec son air des grands jours, il faut emmener votre caisson. Débarrassez-nous de ces chevaux morts, prenez seulement leurs traits et leurs bricoles ; j’attellerais plutôt mon cheval ! »

Et il fait signe au cavalier de mettre pied à terre pour aider. Celui-ci obéit, mais les servants ne bougent qu’à peine, répondant que l’officier veut rire et que quand même il attellerait son cheval on sait bien qu’il ne voudrait pas tirer, ainsi que ça en ferait un de plus à prendre pour les Prussiens, sans compter qu’on a besoin de cheval à manger dans Paris, etc…

Mais Maurice tient bon, et les hommes finissent par obéir. Le cavalier charge le blessé sur sa monture et passe devant. Maurice, comptant sur la docilité de son brave Stanley, le garnit lui-même après avoir installé tant bien que mal un seul palonnier au bout du timon, les artilleurs se mettent aux roues, et Maurice à pied, bride en main à la tête de Stanley, enlève son cheval qui se dresse… et du premier bond brise les traits !

Les servants maugréèrent alors et lâchèrent tout. Le temps pressait. Maurice attelait une seconde fois avec les harnais du second cheval tué ; un des servants