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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

J’ai dit : si je vous revois, chère maman, et je ne sais pourquoi ce mot-là s’est trouvé sous ma plume. Surtout, ne le prenez pas au tragique ; je vais très-bien, et les chances de rencontrer l’ennemi diminuent. Quand je vous reverrai, vous saurez me rendre soumis et enlever l’amertume à ma douleur de vaincu.

Barbier à madame de Thieulin.
Soulgé-le-Bruant, 16 janvier.

Madame,

Celle-ci est pour avoir l’honneur de dire à madame que M. André est retrouvé. Ce n’est pas sans peine, et pourtant il a encore fallu que le ciel s’en soit mêlé.

C’est le 12, comme la grande déroute était dans son plein, qu’il a passé devant moi, un des tout derniers, couvert de boue, noir de poudre, enragé de s’en aller ; en cet équipage, et maigre comme il est devenu, s’il ne m’avait pas reconnu, jamais je n’aurais su mettre son nom sur sa figure. Il allait prendre la route de Laval. En deux temps, je m’en suis allé querir ma jument qu’était pas loin, à l’auberge, et me voilà à la poursuite de M. André.

Mais j’ai commencé dès lors à voir les inconvé-