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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

Madame de Thieulin à madame de Vineuil.
Thieulin, 5 janvier.

Voici, en bien comptant, dix jours que je suis de retour dans mon cher chez-moi, et je n’ai su encore que penser à notre ambulance du Bocage ! J’y pense pour la regretter. J’avais découvert enfin ma vocation (un peu tard, se dit Mlle Berthe en riant). — Ma chère nièce, mieux vaut tard que jamais…

Grâce à la mère que vous avez, vous trouverez sans doute le bon chemin plus tôt que votre vieille tante, et mieux vaudra ; mais si elle l’a trouvé tard, du moins ne veut-elle plus le quitter. Ma vocation, c’est l’infirmerie. On avait eu beau me gâter mon ambulance en dispersant mes pauvres blessés avant qu’ils fussent en état de marcher, jamais je n’aurais pu me décider à la quitter si mes habitudes premières d’obéissance conjugale ne m’avaient ramenée ici dès qu’Adolphe a jugé le moment venu d’y rentrer. Nous avons laissé Roland en possession de l’abbé M*** comme secours et société ; les blessés allemands avaient été évacués sur Orléans ainsi que les Français estimés rétablis, il ne lui restait qu’un petit nombre de malades, il pouvait en effet se passer de nous.