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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

C’était très-poli, n’est-ce pas ? et admirablement prononcé,

Adolphe répondit :

— « Le prince de *** sait-il qu’il a choisi la propre chambre de madame ?… Au reste, la question de ses intentions ou de ses procédés n’a rien à voir dans notre résolution : nous ne dînerons pas avec les officiers du roi Guillaume tant que la Prusse sera en guerre avec la France. »

Et il salua de cet air qui veut dire : Maintenant, allez-vous-en !

Notre major semblait, malgré tout, si poli et si brave homme, que j’essayai d’adoucir les angles.

— « Il ne peut rien y avoir de blessant pour les individus dans la décision que monsieur vous communique, dis-je. Dans d’autres lieux, nous avons partagé les repas de médecins allemands qui soignaient avec nous les mêmes blessés ; mais ici, nous asseoir à votre table serait vous recevoir à la nôtre. Nous n’avons point souhaité la guerre, mais puisqu’elle vous fait nos ennemis, nous ne pouvons pas vous traiter comme des hôtes.

— Madame la comtesse, répliqua le major avec une figure assez embarrassée, je comprends, je comprends très-bien ; mais… permettez-moi de dire… le prince de *** est très-jeune, tout à fait charmant, mais très-jeune, et alors il est… volontaire… Il a envie d’avoir des seigneurs français pour causer en