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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

été ramassés par ses diverses escouades. J’ai rencontré entre autres celle des Suisses de Paris ; ce sont des banquiers, des commerçants, des professeurs, des pasteurs qui sont les brancardiers.

Je rentrais à Paris à neuf heures le soir, quand j’ai dépassé B… et G… que tu connais bien. Ils rapportaient à eux deux, pour finir leur journée, et cela depuis le champ de bataille, un pauvre être en piteux état. Il n’y avait pas eu de place pour lui dans aucune voiture, et je pense que ses porteurs auront conservé une courbature d’autant plus complète que leurs habitudes de vie ne les ont pas préparés à des travaux de ce genre.

Du même à la même
Paris, le 2 octobre.

Strasbourg est pris ! Encore une douleur ! Que je plains Uhrich et ses troupes impuissants à sauver ceux qui s’attendaient à eux ! Livrer une telle population et après tant de souffrances, c’est trop dur.

C’est peut-être une illusion impardonnable chez un homme qui a déjà autant vécu ; mais je ne puis pas croire que, quelle que soit l’issue de cette guerre, la Prusse ose, à la face de l’Europe du xixe siècle, s’approprier jamais ceux dont la protestation sanglante