Page:Bonaparte - Un mois en Afrique, 1850.djvu/75

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éclata ; nous accourûmes, le colonel, M. de Laurencez et moi, mais, même de la tête de la sape, il nous fut impossible d’apercevoir un seul des ennemis, que nous entendions cependant parler entre eux à voix basse. L’endroit où nous étions était, comme toute la tranchée, dominé par des palmiers, mais les Arabes ne s’avisèrent point de renouveler la ruse, dont mon colonel avait failli être victime. Du reste, nous étions sur nos gardes ; nos factionnaires, collés contre l’épaulement, le genou en terre, la baïonnette au canon, le doigt sur la détente, auraient bien reçu les audacieux qui se fussent offerts à eux. Un coup d’obusier à balles fut tiré, mais je crois qu’il passa au-dessus de la tête des Arabes. Aucun ne se montra, et pour ne pas rester inactifs, nous leur renvoyâmes quelques-unes de leurs pierres. Nous sentîmes alors combien des grenades nous eussent été utiles, mais il n’en existait pas une seule à la tranchée, ni au camp. Tout ce que nous pûmes faire, ce fut de placer quelques zouaves à la batterie Petit, d’où l’on pouvait, en tirant obliquement, flanquer jusqu’à un certain point la tête de la sape, non sans risquer de blesser nos sapeurs. Pour obvier à cet inconvénient, et pour toucher l’ennemi dans l’obscurité, on choisit les hommes les plus adroits. De retour à la gourbie du colonel, il ne se passa pas longtemps sans que j’entendisse les cris d’un Arabe, qui, atteint par nos balles, se plaignait d’une voix lamentable. Je demandai la signification de ses paroles à l’interprète du colonel, qui me les traduisit ainsi : « Roumis (chrétiens), disait le malheureux blessé, que vous avais-je fait pour me traiter ainsi ? mon sang coule, mais je suis content de mourir pour ma patrie et pour ma religion ! » Pourquoi la nature de cette guerre impitoyable