Page:Bonnerot - Romain Rolland sa vie son oeuvre.djvu/47

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plus vivants que l’on ait du grand orateur : on le voit « sur l’estrade, allant de long en large, les bras derrière le dos, à pas lourds comme un ours », et On l’entend lançant « à la foule de sa voix monotone et cuivrée... de ces mots martelés qui... par toute la salle, faisaient bondir l’âme de tout un peuple uni dans la même émotion » (Au-dessus de la Mêlée, p. 152.)

Théâtres de fortune en des quartiers lointains, représentations rares et étriquées, critiques absents. Il fallait être joué sur une scène du boulevard pour qu’une pièce fît quelque bruit. Justement Gémier venait de sous-louer le théâtre de la Renaissance pour y donner une série de pièces nouvelles. Une pièce russe de Soukhovo-Kobiline, accompagnée du Portefeuille d’Octave Mirbeau, tenait encore l’affiche, quand commencèrent les répétitions du 14-Juillet, que Gémier monta avec le plus grand soin : la distribution était parfaite. À côté de Gémier qui faisait Hoche, il y avait Beaulieu (Marat), Capellani (Camille Desmoulins), Lenormant (de Vintimille), Fredal (de Launay), Godeau (Robespierre), Baudoin (Gouchon), Mosnier (de Flue), Berthier (l’invalide Briquart), Maxence (l’homme en faction), Jarrier (un crocheteur) ; Andrée Megard (la Contât), Heller (Lucile Desmoulins). La première, avec musique de scène de Tiersot, eut lieu le 21 mars 1902 et la presse fut presque unanime à joindre ses éloges aux applaudissements du public : on admira sans réserve l’animation du Palais-Royal au premier acte, dans un beau décor brossé par Brandt et Rabuteau, — l’éveil saisissant de Paris, rue Saint-Antoine, au second acte, et l’invasion du peuple à la Bastille, au troisième acte. Le héros de la pièce était ce personnage multiple, le peuple de Paris, auquel R. Rolland d’ailleurs avait dédié son œuvre (cf. c. r. de A. -F. Hérold, Mercure de France, t. 42, mai 1902, pp. 512-513 et surtout