Page:Bonnet - Essai de psychologie - Principes philosophiques sur la cause première, 1755.djvu/96

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des sensations, & qui s’aideroit des moyens convenables, parviendroit peut-être à se procurer dans la veille des sensations aussi vives qu’en songe. Mais, l’homme raisonnable est destiné à quelque chose de mieux qu’à se rappeller des sensations. Occupé à enrichir sa mémoire & à cultiver son entendement, il n’oublie point que les sensations sont moins un moyen de perfection qu’un moyen de conservation. L’ébranlement que l’impression des objets cause dans les organes des sens ne cesse pas toujours avec cette impression. On s’en convainc lorsqu’après avoir fixé un objet fort éclairé, on ferme incontinent les yeux ; on croit voir encore cet objet ; on reconnoît sa forme & sa couleur. Il se passe quelque chose d’analogue dans l’organe de l’ouie ; on s’imagine entendre le son d’un instrument ou celui d’une cloche, quoique le corps sonore n’affecte plus l’oreille. L’état actuel de l’organe & le degré d’attention que l’ame apporte à ce qu’elle éprouve, contribuent sans doute à rendre l’ébranlement plus ou moins fort, plus