Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/182

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
CHARLOT S’AMUSE

lançaient à leur suite, les joues empourprées de plaisir, soulevant plus haut leur jupe avec des rires perlés. À mesure qu’elles avançaient, l’eau devenait plus profonde, son courant coupé murmurant contre leurs jambes avec de petits bouillons qui mouraient dans un sillon écumeux. Leur peau semblait toute rose dans ce cercle argenté, et, chatouillées par la caresse froide qui entrait en elles, elles riaient plus fort avec des cris aigus, parfois, et des frissons. L’eau montait toujours cependant, lêchant robe et chemise. La plus brave, soudain, mettait son trident sous son bras et se retroussait des deux mains. Toutes l’imitaient, prises d’une joie folle de gamines naïves à mouiller leurs membres nus. Bientôt elles étaient comme les garçons, semblables à de jolis marbres ; et c’était chez les uns et les autres la même indécision des contours, les mêmes formes, avec une rondeur grassouillette naissante chez les filles, et, sur tous ces petits corps, une chair pareille, fine et blanche, impubère.

Charlot ne voyait pas les jeunes pêcheuses, ou se détournait d’elles, indifférent et sans désirs. Seuls leurs petits compagnons l’intéressaient. Une sorte de misogynie maladive l’avait depuis longtemps envahi, l’emplissant de ce