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CHARLOT S’AMUSE

de s’y livrer à une immonde exhibition devant les fillettes qui jouaient au-dessous.

C’est durant ces périodes d’excitation qu’il sentait, dans un reste de raison, la nécessité de fuir. C’est alors surtout qu’il battait les pavés, voulait hâter par une écrasante fatigue le retour de la période d’affaissement qui lui rendrait le sommeil et retarderait l’éclat qu’il pressentait. Il lui arriva de dire tristement à son patron :

— Je suis candidat à la folie…

Le marchand de fer haussa les épaules. Il avait remarqué les allures louches de son commis, les longues absences qu’il faisait subitement au cours de son travail et l’incurvation significative de sa taille.

— C’est la faute à la veuve Poignet ! répondit-il avec un gros rire.

Et Charlot se mit à rire aussi, lâchement.

Les railleries de son maître le trouvaient à présent insensible. Après avoir fait quelques pas dans la rue, il les oubliait, soudain distrait par un embarras de voitures, ou par un cercle de gamins ricanant autour de deux chiens accolés, l’air très bête, sous une porte cochère. Il ne pensait plus à rien, marchant vite, par habitude, jusqu’au boulevard Saint-Martin. Là,