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CHAPITRE XI.

deux ailes à la figure du serpent, et, quelquefois, un œuf qui lui sortait de la bouche[1].

Plusieurs auteurs ont pensé que la Vouivre, serpent ailé, que les traditions populaires du Jura nous représentent portant tantôt une escarbouble, et tantôt un globe lumineux pour couronne, était une divinité d’origine celtique. Cette assertion est d’autant plus plausible, que l’on retrouve ailleurs, dans les traditions druidiques, une combinaison d’images analogue : les Druides portaient une espèce de boule de cristal, enchâssée dans l’or, qu’ils prétendaient avoir été produite par tous les serpents d’un pays[2].

M. Eusèbe Salverte conjecture que toutes les légendes, comme celle de la Vouivre, où il est question d’un serpent portant un diamant sur la tête, aussi bien que les fables de la mythologie grecque et de la mythologie indienne rappelant le combat d’un héros ou d’un Dieu contre un dragon, pour la délivrance d’une jeune fille, doivent être considérées comme une allégorie astronomique ; qu’elles furent, dans l’origine, l’expression figurée de la position relative qu’occupent, dans les cieux, les constellations de Persée, de la Baleine, de la Couronne et du Serpent, etc.[3]

Il était dans les idées du Christianisme d’adopter l’image allégorique d’un être céleste terrassant l’impur Dragon maudit par l’Écriture. Cette image figura d’abord le combat spirituel de saint Michel contre Lucifer, le triomphe de la Vierge contre l’esprit du mal et des ténèbres ; et, plus tard, en généralisant son application emblématique, la destruction de l’idolâtrie par les premiers évêques de l’Église.

La multiplicité et l’analogie des récits fabuleux, dont il a été l’objet, concourent à prouver que le Dragon fut un symbole familier à l’antiquité et au moyen-âge. Mais peut-être

  1. Monnier, Du Culte des Esprits dans la Séquanie, p. 12.
  2. Légier, Traditions de la Sologne, (Mém. de l’Académie celtiq., t. II, p. 215.)
  3. Eusèbe Salverte, Des Sciences occultes, t. II, p. 290 et suiv.