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SORCIERS, SORTILÈGES.

vent trompés, et j’ai reconnu évidemment que tous trois étaient des fourbes ; qu’ils faisaient eux-mêmes tourner leur baguette, grâce à son élasticité, par des mouvements adroits et insensibles du poignet et des mains[1]. »

En leur qualité de fourbes, les joueurs de baguette méritaient bien d’être classés parmi les magiciens. Après eux, viennent les Devins, les Tireurs de cartes, les Bohémiennes, qui révèlent le passé et l’avenir au moyen des cartes, des dés ; les Bonnes femmes, qui pratiquent la chiromancie, annonçant à chacun sa bonne ou sa mauvaise chance par l’inspection des traits de la main, ou, ce qui est plus étonnant encore, sachant lire votre horoscope dans le marc de café. Enfin, tous ceux qui, par des pratiques insignifiantes, absurdes et n’ayant pas même le mérite d’éblouir un instant l’imagination, prétendent vous initier à quelques révélations prophétiques.

Les Meneurs de loups sont encore une espèce de magiciens ; mais, quoique fort mal intentionnés, ceux-ci doivent être tenus en assez haute estime, parce que, du moins, leur spécialité n’est pas vulgaire. Ils se mettent en rapport avec des loups, dont ils se font suivre, et auxquels ils livrent à dévorer les bestiaux de leurs ennemis. Jugez quelle terreur mêlée de réprobation de telles gens doivent inspirer ! C’est au point qu’on attribue à leurs maléfices tous les ravages occasionnés par les loups les plus naturellement féroces, et qu’on se dispense, par cette raison, de se mettre sur la défensive, et de prendre aucune précaution utile pour écarter ou combattre l’ennemi[2].

N’oublions pas les Toucheurs de carreau : ce sont des charlatans qui prétendent avoir reçu de Dieu le privilège de guérir le carreau par un simple attouchement, à cause, disent-ils avec effronterie, qu’ils sont les descendants de la famille de saint Martin. Il existe aussi, à Bayeux, une famille à laquelle cette faculté merveilleuse a été reconnue depuis un temps im-

  1. P. Le Fillastre, Superstitions du canton de Briquebec ; (Annuaire de la Manche, 1832.)
  2. L. Dubois, Annuaire de l’Orne, 1809.