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LES AVEUX DES COMPLICES.

et entendus après chaque séance par les greffiers du tribunal ; et sur l’affaire de Saint-Étienne-de-Mer-Morte comme sur les autres crimes de Gilles de Rais, leurs dépositions furent ce qu’avaient été les précédentes, unanimes et uniformes : la cause était donc suffisamment instruite ; il ne restait plus qu’à tirer de Gilles des aveux personnels. Car le jeudi, 20 octobre, les juges ne siégèrent que pour entendre la lecture faite par Guillaume Chapeillon de tout ce qui s’était passé depuis l’ouverture des débats, et pour demander à l’accusé ce qu’il avait à dire sur cet ensemble ou à opposer aux conclusions du promoteur. Gilles répondit encore qu’il n’avait rien à ajouter à ce qu’il avait déjà dit. Sur quoi, les juges lui répliquèrent : « Voulez-vous que nous assignions un jour pour donner lecture des paroles et des dépositions des témoins ? » — « La chose n’est pas nécessaire, repartit le maréchal, attendu les aveux que j’ai déjà faits et ceux que j’ai l’intention de faire encore. » — « Voulez-vous, au moins, que les paroles et les dépositions des témoins soient rendues publiques ? » — « Oui, répondit Gilles. » Alors, sur son consentement, l’évêque et le vice-inquisiteur, firent donner lecture de ces dépositions. Quand elle fut terminée, s’adressant à l’accusé, ils ajoutèrent : « Avez-vous quelque chose à dire et contre les témoins et contre leurs dépositions ? voulez-vous en retrancher quelque point ? » — « Non ! » dit spontanément le maréchal. À cette parole, le promoteur se lève ; il s’écrie que cet aveu de Gilles donne aux témoins et à leurs paroles une autorité qui démontre assez la réalité des crimes et la personne du coupable. Cependant, pour que la lumière soit plus complète encore et découvrir toute la vérité, il fait instance pour que le baron soit soumis à la torture ou à la question. La demande était grave, dit le procès ; et l’évêque de Nantes et le vice-inquisiteur demandèrent sur ce sujet l’avis des assesseurs : ce fut uniquement sur leur conseil qu’ils décidèrent d’appliquer la torture à l’accusé[1].

  1. Proc. ecclés., p. xl, xli, xlii.

    Étaient présents : Jean Prégent, Robert d’Espinay, Hervé Lévy, Robert de la