Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/448

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Parmi de si bonnes loix, ce qu’il y avoit de meilleur, c’est que tout le monde estoit nourri dans l’esprit de les observer. Une coustume nouvelle estoit un prodige en Egypte : tout s’y faisoit toûjours de mesme ; et l’exactitude qu’on y avoit à garder les petites choses, maintenoit les grandes. Aussi n’y eût-il jamais de peuple qui ait conservé plus long-temps ses usages et ses loix. L’ordre des jugemens servoit à entretenir cét esprit. Trente juges estoient tirez des principales villes pour composer la compagnie qui jugeoit tout le royaume. On estoit accoustumé à ne voir dans ces places que les plus honnestes gens du païs et les plus graves. Le prince leur assignoit certains revenus, afin qu’affranchis des embarras domestiques, ils pussent donner tout leur temps à faire observer les loix. Ils ne tiroient rien des procés, et on ne s’estoit pas encore avisé de faire un mestier de la justice. Pour éviter les surprises, les affaires estoient traitées par écrit dans cette assemblée. On y craignoit la fausse éloquence, qui ébloûït les esprits et émeut les passions. La verité ne pouvoit estre expliquée d’une maniere trop seche. Le président du senat portoit un collier d’or et de pierres précieuses, d’où pendoit une figure sans yeux, qu’on appelloit la verité. Quand il la prenoit, c’estoit le signal pour commencer la séance. Il l’appliquoit au parti qui devoit gagner sa cause, et c’estoit la forme de prononcer les