Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/498

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Darius qui regnoit en Perse de son temps estoit juste, vaillant, généreux, aimé de ses peuples, et ne manquoit ni d’esprit, ni de vigueur pour exécuter ses desseins. Mais si vous le comparez avec Alexandre : son esprit avec ce génie perçant et sublime : sa valeur avec la hauteur et la fermeté de ce courage invincible qui se sentoit animé par les obstacles ; avec cette ardeur immense d’accroistre tous les jours son nom qui luy faisoit préferer à tous les perils, à tous les travaux, et à mille morts, le moindre degré de gloire ; enfin, avec cette confiance qui luy faisoit sentir au fond de son coeur que tout luy devoit ceder comme à un homme que sa destinée rendoit superieur aux autres, confiance qu’il inspiroit non seulement à ses chefs, mais encore aux moindres de ses soldats qu’il élevoit par ce moyen au dessus des difficultez, et au dessus d’eux-mesmes : vous jugerez aisément auquel des deux appartenoit la victoire. Et si vous joignez à ces choses les avantages des grecs et des macedoniens au dessus de leurs ennemis, vous avoûërez que la Perse attaquée par un tel heros et par de telles armées, ne pouvoit plus éviter de changer de maistre. Ainsi vous découvrirez en mesme temps ce qui a ruiné l’empire des perses, et ce qui a élevé celuy d’Alexandre.

Pour luy faciliter la victoire, il arriva que la Perse perdit le seul général qu’elle pust opposer