Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/514

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de sorte que rien n’égala jamais la gloire de leur milice.

Aussi n’ont-ils rien eû dans tout leur gouvernement dont ils se soient tant vantez que de leur discipline militaire. Ils l’ont toûjours considerée comme le fondement de leur empire. La discipline militaire est la chose qui a paru la premiere dans leur estat, et la derniere qui s’y est perduë : tant elle estoit attachée à la constitution de leur république. Une des plus belles parties de la milice romaine estoit qu’on n’y loûoit point la fausse valeur. Les maximes du faux honneur qui ont fait perir tant de monde parmi nous, n’estoient pas seulement connuës dans une nation si avide de gloire. On remarque de Scipion et de Cesar, les deux premiers hommes de guerre et les plus vaillans qui ayent esté parmi les romains, qu’ils ne se sont jamais exposez qu’avec précaution, et lors qu’un grand besoin le demandoit. On n’attendoit rien de bon d’un général qui ne sçavoit pas connoistre le soin qu’il devoit avoir de conserver sa personne, et on réservoit pour le vray service les actions d’une hardiesse extraordinaire. Les romains ne vouloient point de batailles hazardées mal à propos, ni de victoires qui coustassent trop de sang ; de sorte qu’il n’y avoit rien de plus hardi, ni tout ensemble de plus ménagé qu’estoient les armées romaines.