Page:Botrel - Contes du lit-clos, 1912.djvu/232

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Et la fillette, trait pour trait,
Me parut le vivant portrait
De ma camarade d’enfance :
C’était bien l’azur de ses yeux
Et l’or de ses cheveux soyeux,
Et son sourire d’innocence !

« Ta maman, lui dis-je tout bas,
« Se nomme Lison, n’est-ce pas ?
— Maman ? Elle est au cimetière.
« Mais, si Lison, certainement,
« N’était pas le nom de maman…
« C’est celui de bonne Grand’mère ! »

Et, le cœur empli de remords,
Je me penchai vers les yeux morts
De l’aïeule assise à sa porte
Où, comme dans un vieux miroir,
Un court instant je crus revoir
Notre Jeunesse à jamais morte !

Puis j’embrassai, comme jadis,
Un front d’enfant, et je partis,
Très vite, sans tourner la tête…
Mais, seul, au bout du grand chemin,
Très longtemps, le front dans la main,
J’ai sangloté… comme une bête !…








(Musique de Théodore Botrel. — G. Ondet, éditeur.)