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DEUX DE TROUVÉES

de la misère par vous, sans que l’on ait découvert d’où venait le bienfait. N’ai-je pas deviné juste, docteur.

— Permettez-moi de ne pas répondre à cette question.

— J’apprécie votre modestie et votre pieuse générosité ; mais en vérité, docteur, je ne puis me charger de faire une chose qui, tout en vous dépouillant du mérite aux yeux du monde, aurait l’effet de me faire attribuer l’honneur d’une action dont je ne serais pas l’auteur.

— Vous pourrez, monsieur le juge, dire que cette somme vous a été remise par une personne inconnue.

— Non, vraiment, docteur, je me ferais un scrupule d’accepter, vu surtout que c’est une somme que je vous dois. — Voyons le montant de votre mémoire.

Le docteur Rivard se rendit enfin aux raisons du juge, bien content de pouvoir toucher le montant de son compte tout en laissant son client sous l’impression qu’il ne l’acceptait que pour le distribuer aux pauvres. Le docteur avait eu le soin de réduire le mémoire de moitié.

— En vérité, docteur, vous n’êtes pas raisonnable ; vingt-quatre mois de soins et de visites pour moi et ma famille, et vous ne demandez que deux cent trente-six piastres !

— C’est bien suffisant, et en conscience je me reprochais presque de l’avoir fait monter si haut, si ce n’est que j’avais eu l’intention de vous en laisser le montant pour le distribuer en œuvre de charité. Vous êtes bien le premier auquel j’entends dire qu’un mémoire de médecine est trop faible.