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UNE DE PERDUE

roches se divisait et revenait sur elle-même de manière à laisser un enfoncement en forme de fer à cheval, où la mer formait une esterre ou cul-de-sac, assez grand pour contenir six à sept vaisseaux qui se trouvaient complètement cachés et du côté de terre et du côté de la mer.

L’entrée de cette esterre était si étroite et tellement encombrée de joncs et de plantes marines, qu’il eut été impossible de soupçonner qu’elle existât, à moins que par accident quelque canot pêcheur ne se fut adonné dans le tortueux chenal qui après avoir serpenté à travers ces prairies flottantes, aboutissait à un magnifique bassin d’eau. Ce qui était d’autant plus improbable, qu’aucun canot pêcheur ne s’éloignait autant de la baie ou de la ville de Matance, ne dépassant jamais l’extrémité de la langue de terre, dont la pointe était connue sous le nom de la Pointe aux Cormorans, ainsi appelée en raison des milliers de Cormorans qui y faisaient leur séjour. Le chenal qui était presque caché à son embouchure, allait en s’élargissant, et était, ainsi que l’esterre, assez profond pour laisser flotter aisément un vaisseau qui aurait tiré douze à quinze pieds d’eau.

Une plage de sable blanc et fin bordait l’intérieur de l’esterre, et offrait comme une lisière blanche tout autour, ayant une couple d’arpents de profondeur, qui allait en s’élevant jusqu’aux pieds des rochers qui semblaient surplomber, à une hauteur de plusieurs centaines de pieds, le bassin d’eau qui gisait à leurs pieds. Du haut du rocher on ne pouvait apercevoir la lisière de sable qui se trouvait au bas, et l’on eût cru qu’en laissant tomber une pierre, elle eut dû tomber dans l’eau.