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UNE DE PERDUE

Clarisse Gosford et tous les autres étaient loin de penser que ce qu’elle disait là, par esprit d’innocente malice, pouvait bien être la vérité.

— Pas possible. Qu’en pensez-vous, capitaine ?

— Ce que j’en pense, répondit le capitaine, c’est que ce sont deux bons vaisseaux marchands, qui vont probablement à la Nouvelle-Orléans ou à la Mobile et que demain nous aurons complètement perdus de vue et laissés bien loin derrière nous.

En ce moment la clochette du souper se fit entendre, et le comte, passant cette fois par l’escalier, alla réparer sa toilette pour se mettre à la table, où le capitaine et tous les passagers s’assirent.

Le repas fut gai, comme le sont tous les repas en mer lorsqu’il ne fait pas de tempête.

Le comte rassuré par le capitaine, à l’endroit des deux voiles à l’arrière, fut d’une excessive jovialité.

Après le souper, on monta sur le pont ; le capitaine et Sir Gosford se promenèrent ensemble ; Clarisse et son amie, appuyées sur le bord du navire, regardaient les bouillons phosphorescents qui semblaient courir le long du navire, en faisant un bruit semblable à celui d’un bâton mouillé avec lequel on brasserait des cendres rouges. Le comte lui, alla se coucher pour prévenir l’effet du tangage, qui commençait un peu, disait-il, à lui remuer les vivres sur l’estomac, qu’il avait affaibli par de copieux tributs journellement répétés.

Le vent avait un peu renforcé, mais le ciel s’était éclairci ; les nuages s’étaient dispersés ; et le firmament d’un bleu si pur sous les tropiques étincelait des feux des milliards d’étoiles dont il était parsemé.