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DEUX DE TROUVÉES

n’attendaient qu’un souffle de vent pour commencer leur œuvre de destruction et de carnage.

À mesure que le calme durait, la sérénité prenait dans l’âme de tout le monde la place des sentiments si naturels d’appréhension et de crainte, que l’on éprouve à la veille d’une bataille et surtout d’une bataille sur mer, où il n’y a pas de retraite possible. Sur mer, la mort vous environne de tous côtés ; sur le vaisseau le fer, le feu, les balles ; hors du vaisseau la mer et ses abîmes. La mort, partout la mort !

Les heures s’écoulèrent ainsi, chacun parlait peu mais pensait beaucoup, jusqu’à ce que la clochette du maître d’hôtel, encore une fois, vint annoncer que le dîner était servi. *

Sur les quatre heures de l’après-midi, la mer était tout à fait calme ; les avaries du Zéphyr était complètement réparées ; des mâts de rechange avaient été substitués à ceux qui avaient été brisés, de nouvelles voiles avaient remplacé celles qui manquaient. Quand le dernier cordage eut été fixé dans les poulies, un hourra s’échappa simultanément de la poitrine de tout l’équipage, et à bord tout sembla rentrer dans les habitudes de routine journalière. Il semblait que la corvette n’était plus là, à leurs talons. Le Zéphyr avait toutes ses voiles maintenant et pouvait se jouer de la corvette ! À la profonde sollicitude avait succédé une espèce de folle et insouciante sécurité. Les tribordais descendirent dans la batterie, et les babordais faisaient nonchalamment leur quart.

Le reste de la journée se passa ainsi et le soleil descendit dans la mer où il s’engloutit lentement comme un globe de feu.

Après le souper, l’atmosphère était lourde et le