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DEUX DE TROUVÉES.

première libérée ; ainsi de suite en commençant à retrancher les dernières.

— Ne pensez-vous pas, M. de St. Luc, reprit le premier interlocuteur, que les nègres ne craignent, qu’après avoir payé leur $50, le maître leur refuse leur heure libre ; et que cette crainte ne les empêche de travailler à leur rachat ?

— Cette crainte, répondit le capitaine, pourrait en effet empêcher les nègres d’avoir confiance en leur émancipation future, s’ils la voyaient laissée entièrement à la promesse du maître ; c’est pourquoi je suggérerais, pour la satisfaction du maître et de l’esclave, que le payement fût fait entre les mains du régistrateur de la paroisse, qui serait autorisé à l’enrégistrer et à en donner certificat à l’esclave.

— Mais si le maître, après avoir touché l’argent, refusait ensuite la libération ?

— Quant à cela, il n’y a pas de doute que le maître pourrait refuser la libération, à moins qu’il n’y eut une loi de passée à cet effet. Si le plan que je vous ai soumis rencontre la faveur du public, il faudra demander à la législature une loi qui règle les dispositions et les formalités du rachat graduel des heures de travail.

— Je vois une autre objection, dit un second planteur ; le nègre, qui est naturellement indolent et paresseux, se dira à lui-même — « À quoi me servira de racheter une heure, deux, trois ou quatre heures, si je meurs je perdrai tout et j’aurai donné mon argent pour rien ? » — Cela seul l’empêchera de travailler à son rachat.

— Le nègre, continua Pierre de St. Luc, ne sera pas arrêté par cette crainte, car chaque certificat que lui