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DEUX DE TROUVÉES.

sur lequel on lisait : Journal d’émancipation de l’habitation St. Charles.

— Mes enfants, dit le capitaine, en s’adressant à ses esclaves, après avoir bien réfléchi à ce qu’il y avait de mieux à faire, pour accomplir les désirs de votre bon maître, qui est mort en vous recommandant à mes soins, j’ai pensé que je ne pouvais mieux rencontrer ses vues, et vous en faire apprécier les résultats, que de vous donner les moyens de gagner votre liberté. Pour y parvenir il vous faudra du travail et de la bonne conduite, mais pas plus de travail cependant que vous n’en pouvez faire. Voulez-vous travailler pour gagner votre liberté ?

Les nègres se regardèrent les uns les autres, mais pas un ne répondit.

— Pourquoi ne répondez-vous pas ? L’économe ne vous a-t-il pas dit que je voulais vous donner les moyens de gagner votre liberté et de vous racheter ?

Tous les esclaves demeuraient silencieux, leurs grands yeux blancs fixés sur leur maître.

— Avance ici, Pompée, dit le capitaine en s’adressant à un des plus intelligents et des meilleurs de l’habitation ; et toi, que dis-tu ?

— Rien, mon maître, dit Pompée en s’avançant la tête basse.

— Comment, rien ! Ne voudrais-tu pas devenir libre ?

— Oh ! oui, mon maître.

— N’aimerais-tu pas à pouvoir acheter ta liberté ?

Pompée regarda son maître, roulant sa casquette dans ses mains, sans rien dire.

— Réponds donc.