Page:Bouchor - Les Symboles, nouvelle série.djvu/37

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Entre la mère en pleurs et le fils tant pleuré,
L’homme dit : « Que ton cœur cesse d’être ulcéré.
Tu le vois, femme, il ouvre enfin ses yeux candides.
Dans le céleste Eden, sous les palmiers splendides
Où jamais le Serpent n’enroulera ses nœuds,
Vont s’écouler pour nous des siècles lumineux.
Certes, je le sais trop, l’arbre de la Science,
Oui nous charmait aux jours d’heureuse insouciance,
Par ses fruits douloureux a fait nos longs malheurs ;
Mais tout cela n’est plus ; il faut sécher nos pleurs.
Christ a planté pour nous, Eve, ma bien-aimée,
Un arbre plein de grâce, à l’ombre parfumée,
Riche en grappes de pourpre et tout baigné de miel :
L’arbre de la Pitié, qui fleurit dans le ciel. »

Écartant les cheveux dont elle était voilée,
Eve, à ces mots, les yeux en pleurs, mais consolée,
Apparut dans sa grâce auguste d’autrefois ;
Et tous la contemplaient, quand, d’une sourde voix.
Pareille au bruit lointain des flots pendant l’orage,
L’impur Satan, toujours invisible, avec rage
Admonesta l’Enfer. « Sais-tu bien qui j’attends ?
Un homme que j’exècre ; et, dans quelques instants,