Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/147

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Contraste effrayant de l’homme, son aspect, sa conscience latente ! Je vois là l’énorme sacrifice. Au plus aigu d’une enivrante mélancolie, épuisé de doutes, de méditations, se résoudre à paraître un pacifique promeneur.

O jaunes tilleuls de Kônigsberg, pauvre et poudreuse petite route rose, vous êtes le lieu tragique du plus superbe exploit ! Nulle part comme ici, parmi ces quinconces, l’ombrage frémissant de ces arbres, on ne peut ressentir avec cette éloquence, la beauté exténuante d’une renonciation.

Agissons donc comme Kant, méthodique villageois f Le blanc repos des maisons l’apaisa. Il en éprouvait la sécurité. 11 est impossible que de telles rumeurs, l’orage clair des charrettes, les retentissantes places publiques, comblées de gerbes, d’ânes, de troupeaux, le bruit rythmique de l’eau qui sonne et s’engouffre aux noirs porches des ponts, toute cette urbaine et harmonieuse activité n’ait point ràssassié, calmé ses. angoisses. Il y prenait .l’excuse de vivre. Une telle placidité le pénétrait. Il ressentait sans doute la bonne douceur fraîche qui émane du rire, du soleil, des fleursIl marchait libre, ébloui, il respirait l’odeur des plantes, du pain fait d’orges noires et bien cuites.

Cependant, agissons aussi à l’instar des bourgeois dc Kônigsberg ! — En effet, sommes-nous assurés de la véracité humaine ? Comment surprendre une certitude, quand des hommes comme Rousseau,.