Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/175

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regardez enfin, il en passe sans cesse sur la route. — Heureux celui que satisfait son soit, à tout instant, malgré la nuit et les cyprès, les trafics pires, les plus cruelles peripéties.

Polonius, Lucinde et Roland, les bas héros, et quels combats ? Quelle grâce, quelle luxure, quelle mélancolie en sa fleur, quel prodige de joie et d’horrible ! On ne vous contera plus de telles histoires, Clarisse. Leur prophétie est mensongère. Personne n’a vécu ainsi. Occupons-nous des tragédies que jouent les anges. Ma courtoisie amoureuse vous épargnera l’avertissement des pastorales allégories. Persister à les décrire ce serait un manque de convenance. Il m’ennuierait d’imaginer la future turbulence de nos deux destinées. Je les sais belles et exquises aujourd’hui, mais peu importe leur aspect proche ! Peu importent l’infortune ou le triomphe prochains ! Le simulacre en discrédite le tour. Ne tentons rien que ne désire le monde. Un homme devient le roi, le dieu ou le pirate que nécessitent les conjonctures prévues. Parmi le pauvre enclos bordé de haies fleuries, la forêt et l’opaque lac vert, soyons heureux des plus vivaces palpitations. Il rie s’agit pas de tromper le sort mais de lui restituer sa grâce. Les rôles dont nous tentons le jeu, n’oublions point que les archanges les jouent pour nous d’un ton plausible, devant Dieu même : De minuscules mots lui semblent adorables que prononcent des hommes malheureux. L’appel d’un pasteur qui sifflait son chien je l’ai pensé plus pur, plus sublime et pompeux que les maximes des anciens sages. II s’agit de vivre avec certitude. Le bonheur habite sous mon toit tremblant.