Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/27

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des péninsules et des coteaux, les golfes d’Egypte et les montagnes de Tllrace. Quelquefois, l’anecdote dujour m’offrait l’intrigue et les héros que je douais alors d’une vive énergie et ils paraissaient candides, tumultueux.

Cependant, la plupart du temps, c’est aux circonstances de notre existence que j’empruntais celles de mes drames, et leurs scènes qui semblaient nouvelles et inconnues n’étaient pas autre chose que les banales péripéties de nos destins. — Clarisse en était d’autant plus émue.

Elle n’apprenait point sans effroi que des hommes peuvent subir d’aussi grandes catastrophes. De quelqu’antérieure intention je lui exposais le succès, et mes récits en figuraient les conjonctures. Combien d’entreprises lui ai-je racontées qui n’étaient que l’accomplissement de ses désirs ! Elle s’y retrouvait très confusément. Elle n’en suspectait pas la vraisemblance. A aucune minute elle n’eut reconnu que telle ou telle calamité épouvantable réalisait d’anciens desseins et ressemblait à ses pensées. Mais il est certain qu’elle le pressentait.

Nous avons aperçu Ulysse parmi cette île rose qu’illumine l’aurore ! Sur les froids rivages du fleuve Aréthuse des nymphes bondirent, pliant les joncs, dans l’instant que nos barques brillaient. A Ithaque, nous vîmes Pénélope. Le vieil Eumée nous accueillit. L’ardente blancheur de ton visage, ô Clarisse, délicieuse amie, éclaira le seuil du berger. Des agneaux bêlèrent dans l’espace des vents. Au front des monts tremblaient des grappes.

C’est ainsi que se dissipait l’ennui du temps. Nous