Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/59

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Après que des désirs semblables m’eurent agité des plus extrêmes mélancolies, je m’y suis senti défaillir. Leur frénésie m’accabla, et je tombai dans l’ennui. Exténué et élégiaque, je fus des jours, des mois, sans pouvoir seulement m’exprimer. J’ai cru le destin dépourvu d’espoir. L’excès même de mes émotions en composa le chaos. Je pensai y succomber.

Peu à peu je me reconquis. On ne peut exister ainsi. Du plus pauvre au plus magnifique, chacun de nous a besoin d’un bonheur. Qu’il le découvre au milieu des couronnes, ou près des petites vierges, riantes et enrubannées, aucun homme ne persiste à vivre sans allégresse. — Ainsi vers le temps de ma peine, je connus que ma fortune même était inséparable du sort de la Beauté. Je cherchai des confidents. « Je ne puis demeurer ici parmi tant de héros vulgaires », me suis-je bien des fois écrié. Car mon atmosphère était celle de Dieu.

Ces brutaux héros du hameau puéril, ces bateliers, ces laboureurs, aujourd’hui, je les sais sublimes, ma ferveur vénère leur magnificence ! Par quelles étapes suis-je donc passé ? Quelles régions de l’âme ai-je franchies ? — Après tant de mélancolies, des journées languissantes, sans fin, qui se passèrent, Vqj»6. vous souvenez, à lire des romans d’aventures, parmi l’ombre et l’azur, de bouillonnantes berges bleues, Jes prairies, les déluges, il m’est devenu aisé et Joisible de juger des petites passions qui exténuent les gens des campagnes et du bourg. A l’époque des exploits d’enfance,