Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/60

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ceux des héros, d’Aristide m’occupaient. J’ai éprouvé alors plus de goût pour la guerre, que ne m’en inspiraient les parades romanesques.

Cependant le sûr, l’admirable, c’est la sensibilité ! Peu importent les modes d’expression. Comme je brûlai d’agiter l’univers de mon héroïsme et de mes rêveries, de ces pensées desquelles je m’attribuai la grâce, je l’eus fait aussi bien par l’horreur des conquêtes que par le tumulte amoureux des chants !

Dans un temps moins iade, moins glacé, stagnant, peut-être eussè-je conquis des villes, des archipels, les rivages qu’aurait convoités mon ambition. Cette passion de remuer le monde, il ne faut point imaginer que ce soit seulement du délire. S’exprimer, retentir, contribuer pour sa part à la destinée naturelle, voilà le mobile de ce sentiment où rien de l’orgueil ne ,demeure, mais une exceptionnelle frénésie intérieure.

D’ailleurs, toute destinée m’éblouit. Au lieu dé nous apitoyer sur ses douloureuses conjonctures, persuadons-nous de sa sollicitude. Les événements me paraissent bénévoles. Leur mansuétude, par rapport à notre âme, compense ce qu’ils ont de froissant, d’inattendu et de tragique à l’égard de notre existence de tous les jours.

Il ne s’agit point de les repousser, mais acceptonsles comme la pluie et l’ombre.

En quelqu’endroit que m’entraînent mes destins, je les •suivrai tendre et docile. Pourquoi préférer un château à ce pauvre enclos tout blanc sous les fleurs ? A mon bonheur quotidien je ne désire pas substituer le vôtre ou celui d’un empereur heureux, du jeune pâtre ou de