Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/65

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routes où elle passe courent au seul village. — Elle compose, pour le roi, le laboureur, nous-même, la substance quotidienne de l’âme, le pain et le sel incisifs ! Elle nourrit les hommes les plus disparates. Le ciel la transforme, l’eau se l’assimile, l’été et la lune ! Nous l’aimons selon qu’elle contente nos plus secrètes, nos plus chères intentions. Sans que s’effrite sa forte splendeur, elleprend la beauté de qui la désire. L’antique sang héréditaire, cent mille ans de fièvre et d’extase, alors, lui insufflent une neuve expression. — Ainsi personne ne peut comprendre — et jamais, et rien, même cela ! >

Je le sais, bien mais peu importe ! Heureux celui que satisfait son infortune. Il semble que je parle comme un étranger. Puissé-je vivre, immobile, enfin, parmi l’humble enclos bordé d’or !

Si j’ai prêché, ce fut pour que Dieu m’entendit. — Comme ces prés de glace et de rocs palpitent dans l’attente de l’Avril, ainsi les sites de noires rocailles, les bergers, les fleuves et l’énorme ténèbre espèrent la tendresse de ma rédemption. Et vous êtes plus belle, à présent, Clarisse, depuis ma venue angélique. Et elles sont plus fraîches ces fleurs, ces forêts. — Cependant, nul ne m’a compris. — Les vérités que j’ai criées, tout homme les transforma comme l’air duquel s’imprègnent et que respirent les mondes. Elles.ont pris, chacune, un aspect contraire ; et ainsi, tumultueuses, je ne les distingue plus. Elles me regardent, ces blanches idées, comme un étranger douloureux. Elles rient, — de même que vous, Clarisse, — voyez elles me narguent, elles s’enfuient.